Vue du premier col |
Il y a des
choses qui ressortent bien en photos et d'autres choses qu'il faut
voir de ses yeux. Malgré le nombre de tentatives de capturer ce
paysage, je n'y suis pas arrivé. Je vais donc essayer de vous le
décrire. Cela s'est passé hier après-midi entre La Union et
Huaraz.
Cela fait une
petite heure que je dors en écoutant Noir Désir quand je me
réveille. Nous avions au départ suivi le fond d'un canyon et nous
étions maintenant bien au dessus de la vallée dans laquelle nous
nous trouvions. Par la fenêtre, j'aperçois des sommets enneigés et
autour, des petites landes où l'herbe rase survit aux températures
nocturnes et au vent. « L'Europe » rythme le moment. Le
bus continue de monter et chaque tournant révèle un peu plus le
sommet près duquel nous allons passer le col. Le sommet est sous les
neiges éternelles mais les flancs près de celui-ci sont couverts de
neige fraîche. Plus bas, sous le niveau de neige, on voit très bien
les couches sédimentaires qui ont été pliées dans tous les sens
pour donner naissance à ce pic. Malheureusement, la saison humide
arrive et les nuages occultent les autres sommets qui n'ont pas tardé
à apparaître également. Nous passons le col et descendons suivons
une nouvelle vallée. Près du col, il y a un élevage dont la maison
est construite en pierre et le toit en chaume. L'éclat d'or du toit
et les sommets qui se découpent en fond feraient facilement penser à
un paysage de Skyrim.
La lande et les montagnes en fond |
Le bus descend
encore un peu et s'arrête près d'une mine pour embarquer trois
nouveaux passagers puis prend une route à droite qui remonte
légèrement au début mais devient de plus en plus raide au fur et à
mesure qu'on approche du col. La musique est maintenant l'album
« Animals » de Pink Floyd mais je n'y prête que peu
attention. Ce qui m'importe vraiment est de découvrir ce qu'il y
aura une fois le col passé. Les derniers kilomètres sont
particulièrement pentus mais cela ne fait que rajouter au suspens
dans lequel je me trouve. J'imagine d'autres montagnes mais pas ce
que je vais découvrir. Je dois attendre encore un peu car au col, la
route se divise et nous nous arrêtons près d'un lieu où une femme
crie qu'elle vend des fromages. Le bus repart et le paysage qui est
révélé est surprenant et presque magique. Il s'agit d'une immense
lande un peu comme l'Aubrac mais dont les frontières sont marqué
par des pics enneigés dont je sais que certains culminent à plus de
6000 mètres d'altitude.
Une autre tentative mais c'est difficile surtout que les vitres ne sont pas propres |
J'essaye de prendre des photos de part et
d'autre du bus et je sens bientôt que malgré l'habitude que j'ai
des hauteurs, les souffles doivent se faire plus profonds. Je ne sais
pas exactement à quelle altitude nous sommes mais probablement aux
alentours de 4500 mètres. La lande se révèle au fur et à mesure
aussi, tachée de vert aux endroits les plus humides et d'une couleur
jaune ocre pour le reste. Quelques élevages coupent l'uniformité de
cette lande et j'imagine que la vie ici ne doit pas être simple. Une
lagune se trouve au point le plus bas du plateau et la plupart des
ruisseaux s'y jettent sans jamais atteindre la mer. Nous passons un
nouveau petit col où se trouve une pesée de véhicules lors de
laquelle trois marchandes montent dans le bus. Le fromage me fait
envie et je craque pour 500 grammes à un euro. Nous le mangeons dans
le bus et sans accompagnement. Pendant ce temps, le bus suit toujours
la cordillère blanche. Les sommets sont pour la plupart dans les
nuages mais le paysage est toujours magnifiques mêmes si de plus en
plus de mines bordent la route. Je comprends maintenant pourquoi elle
est goudronnée.
Je me suis
rendormi avant d'arrivé à Huaraz et nous nous dirigeons vers un
hôtel qui est sensé avoir le wifi, une cuisine et des chambres
confortables. Il s'appelle Caroline Lodging et n'est pas simple à
trouver surtout avec une carte de Lonely Planet qui n'est pas
forcément très précise.
Aujourd'hui sera
un jour glandouille car Nora est un peu malade et on veut garder des
forces pour quelques jours de marche du côté de Corongo où nous
devons rejoindre Carola et Eilif. Il semble qu'il y ait beaucoup à
faire là-bas aussi mais avec les touristes en moins. Nous avons donc
pris notre billet de bus pour le village car il n'y en a que deux par
semaines et nous avons fait le marché qui lui aussi valait le
détour.
Il faut
s'imaginer un endroit où vont les locaux et où les systèmes de
réfrigération ne sont pas obligatoires. Il y a donc des étals avec
une quinzaine de poulets pendus à un crochet de boucher miniature,
un autre avec une trentaine de cuy pelés, un suivant avec une
dizaine de cochons pelés et un grillé mais aussi des primeurs dont
le choix défit toute concurrence dans une bonne partie du monde, des
épiceries où l'on peut choisir la quantité de riz, de farine, de
quinoa ou de maïs dans un grand sac de jute et je passe les
quincailleries en tout genre qui bordent les allées. Il est à
l'image de nombreux marchés des Andes mais je n'en avais encore
jamais parlé. Il est souvent déconseillé dans les guides aux
voyageurs de s'aventurer dans les marchés mais pour y avoir été un
bon nombre de fois, nous n'avons jamais eu de problème et les gens
sont même nettement plus sympathiques que dans les boutiques
réservées aux touristes et qui sont aussi plus chères. Cela dit,
je n'achèterai pas de viande dans un marché.
On voit bien les plissures |
Un village de Bordeciel |
La laguna |
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